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Question écrite concernant les impacts socioéconomiques potentiels de la zone de basses émissions bruxelloise sur les ménages, les entreprises et l’offre de services

de
Sevket Temiz
à
Alain Maron, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de la Transition climatique, de l'Environnement, de l'Énergie et de la Démocratie participative (question n°1697)

 
Date de réception: 15/04/2024 Date de publication: 10/06/2024
Législature: 19/24 Session: 23/24 Date de réponse: 10/06/2024
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
18/04/2024 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question    Lors de son établissement en 2017, l’instauration d’une zone de basses émissions (LEZ) en Région bruxelloise répondait au devoir impératif de corriger la situation très préoccupante de la qualité de l’air pour laquelle nous dépassions les valeurs seuils imposée par l’Europe en matière tant de particules fines que de Nox.

Pour ce faire, votre prédécesseure avait organisé un large cycle de concertation de l’ensemble des stakeholders bruxellois ayant conduit à la publication systématique des rapports et compte rendus des différents workshops. Cette méthodologie n’a malheureusement pas été reconduite depuis lors alors que les échéances des prochains jalons de bannissement 2025, 2030 et 2035 vont représenter des défis croissants pour les ménages et entreprises bruxelloises.

Compte tenu de ces jalons ambitieux, l’on est en droit de s’interroger quant aux effets socioéconomiques induits pour les ménages et les entreprises par ce mécanisme d’obsolescence programmée sur une logique de date butoir, de par le nombre de véhicules déclassés, leur perte de valeur sur le marché de l’occasion, l’effet induit sur le prix des véhicules d’occasion conformes pour remplacement mais également compte tenu de l’absence de synchronisation de certaines échéances ou objectifs (comme le tout à l’électrique de 2035), l’impact de ces jalons sur l’offre de services d’entreprises extérieures à la Région bruxelloise, voire la distorsion de concurrence induite entre entreprises, aux dépens de celles situées dans une Région imposant des investissements que d’autres n’imposent pas... Pourtant, aucune de ces questions n’a, à ce jour, été abordée par les rapports commandés par Bruxelles Environnement au cours de cette législature.
  • Quelles sont les parties prenantes ayant été consultées au cours de cette législature dans le cadre de la mise en œuvre ou du renforcement de la LEZ ?

  • Les questionnaires, réponses et comptes rendus sont-ils publiés ?

  • Quelles ont été les concertations menées avec les deux autres Régions, quand ont-elles eu lieu, sous quel format et qu’en est-il précisément ressorti ?

  • Sur la base des données DIV disponibles, quel est le nombre de véhicules diesel et essence immatriculés en Région bruxelloise qui seront prochainement frappés d’obsolescence programmée au 1er janvier prochain ?

  • Pour les mêmes catégories de véhicules, sur la base des données ANPR, qu’en est-il du nombre de véhicules de navetteurs provenant de chacune des deux autres Régions ?

  • Est-ce que d’autres études complémentaires ont été commandées et sont attendues afin de documenter les instances régionales quant à l’impact socioéconomique des prochains jalons pour les ménages et l’économie régionale dans son ensemble ?

 
 
Réponse    1.
Dès le début de la législature, un travail approfondi de consultation des parties prenantes a été mis en place pour élaborer et mettre en œuvre la zone de basses émissions.


Ainsi, pour élaborer le calendrier LEZ 2025 – 2035, un processus de consultation des parties prenantes de plus de deux ans a été mis en place. Composé d’une phase écrite et d’une phase de tables-rondes et de bilatérales, celui-ci a ensuite été renforcé par 4 études distinctes (santé, environnement, socio-économique et mobilité).



Par la suite, un processus d’une dizaine de tables rondes a permis de renforcer les mesures d’accompagnement liées à ce calendrier, en aboutissant sur l’adoption et la mise en œuvre de la feuille de route « Low Emission Mobility Roadmap ».

Un processus similaire a été mis en place pour élaborer la roadmap « Electrify.brussels », au cours duquel plus d’une trentaine de parties prenantes ont été consultées, sur base de nombreuses analyses et d’un benchmark de villes similaires à Bruxelles.

Chaque année, Bruxelles Environnement organise des journées de réflexion et de suivi de la politique de décarbonation menée à Bruxelles, via les « Mobility Salons » et les « Low Emission Mobility Days » qui réunissent de nombreuses parties prenantes. Plusieurs moments de concertation avec les communes et les autres Régions ont également lieu chaque année, dans le cadre de la collaboration nouée avec Brulocalis, la Conférence des Bourgmestres, notamment.

Des entretiens bilatéraux réguliers ont également lieu dans le cadre du projet « ZEPA », qui accompagne de manière technique et organisationnelle la mise en œuvre de nombreux projets liés à la feuille de route bruxelloise de décarbonation du transport.
2.
De nombreux documents sont disponibles en ligne :

- Les études et consultations réalisées dans le cadre de la Roadmap Low Emission Mobility sont disponibles sur le site de Bruxelles Environnement ;
- Les avis émis dans le cadre de l’enquête publique du PNEC sont disponibles sur le site de Bruxelles Environnement ;
- La stratégie Electrify.brussels détaillant les consultations réalisées et leurs résultats est disponible sur le site régional du même nom ;
- Les présentations effectuées dans le cadre des « Mobility Salon » et des « Low Emission Mobility Days », ainsi que le résultat des workshops organisés dans ce cadre sont disponibles sur le site de Bruxelles Environnement.
3.
Les projet d’arrêté fixant les calendrier de la LEZ 2025 – 2036 ainsi que le projet de Roadmap ont été soumis pour avis à la Conférence Interministérielle de l’Environnement étendue aux Ministres de la Mobilité en septembre 2021. A cette occasion, les membres de la CIE élargie ont pris acte de la concertation menée par la Région bruxelloise ainsi que de la proposition de la RBC d’organiser des workshops techniques réguliers sur les zones de basses émissions en Belgique afin de partager les bonnes expériences et des pistes d’action communes, et ont décidé que l’endroit adéquat pour aborder les discussions de décarbonation du transport était dans un GT « Décarbonation du transport » de BE4Move.
Deux réunions de coordination ont également été organisées en 2022 avec un focus sur la communication, l’évolution des cadres légaux des LEZ et des échanges en termes de contrôle des véhicules immatriculés à l’étranger. Celles-ci ont permis d’échanger sur l’évolution respective de la législation dans les trois régions.
4.
La LEZ restreint l’usage des véhicules en fonction de leur carburant et norme euro. Il ne s’agit toutefois pas d’un programme d’obsolescence programmée. En effet, ces véhicules peuvent encore circuler en dehors de la LEZ, voire encore dans la LEZ moyennant l’achat d’un daypass – pour maximum 24 jours par an. Notons également que certains véhicules peuvent bénéficier d’une dérogation (les ménages avec une carte de stationnement pour personnes à mobilité réduite) et que les titulaires d’un véhicule concerné par le jalon 2025 de la LEZ recevront d’abord un avertissement.



Au 31/12/2023, le nombre de voitures diesel Euro 5 et essence de norme Euro 2, s’élèvait à 40.000 voitures immatriculées en RBC, ou 8% des voitures immatriculés en RBC. Ce nombre est en diminution depuis plusieurs années. L’expérience montre également que ce pourcentage diminue fortement les mois précédent l’entrée en vigueur d’un jalon, en raison des mesures de communication prises par le Gouvernement. Un cadre législatif clair et stable est donc important pour garantir l’efficacité de la LEZ.



Rappelons également que les véhicules concernés par la LEZ ont fait l’objet d’une étude de remote-sensing organisée sur le territoire de la Région bruxelloise, qui démontre qu’ils sont jusqu’à 5 fois plus polluants qu’en laboratoire. Les véhicules contrôlés représentaient jusqu’à 40% des émissions du transport mesuré dans le cadre de ce projet. Pour cette raison, les recommandations du projet allaient donc dans le sens d’une accélération des jalons de la LEZ.



Notons également que dans les mois à venir, une dérogation pour les personnes PMR réduira fortement le nombre de véhicules concernés par la LEZ bruxelloise. Les chiffres mentionnés ci-dessus sont donc une surestimation.
5.
Pour les véhicules des navetteurs, notons qu’il ne s’agit pas non plus d’un programme d’obsolescence programmée : outre les possibilités citées ci-dessus, plusieurs P+R situés hors de la LEZ existent également.

Les dernières données ANPR dont Bruxelles Environnement dispose actuellement datent de mai 2023. A ce moment, environ 14% des véhicules immatriculés en Flandres et Wallonie étaient des diesels Euro 5 / essence Euro 2. Cette part est en diminution nette depuis plusieurs années.

Notons également que dans les mois à venir, une dérogation pour les personnes PMR réduira fortement le nombre de véhicules concernés par la LEZ bruxelloise. Les chiffres mentionnés ci-dessus sont donc une surestimation.
6.
Plusieurs études réalisées en partenariat avec Bruxelles Environnement ont été publiées ces derniers mois :

- Une étude de remote-sensing menée par l’International Council on Clean Transportation a permis d’illustrer les importantes réductions de polluants atmosphériques qui seront enregistrées grâce aux prochains jalons de la LEZ, en raison des importants dépassements d’émissions observés sur les véhicules concernés.
- Une étude réalisée par la KU Leuven et les Mutuelles Libres démontre que les villes dotées d’une LEZ réduisent plus rapidement que les autres les concentrations de polluants atmosphériques, et que les quartiers les plus précarisés sont les principaux bénéficiaires de ces améliorations à Bruxelles.

Toutes deux emportent d’importantes leçons en termes d’impact de la LEZ sur les ménages et les entreprises bruxelloises.

Bruxelles Environnement suit également de près l’évolution de la flotte de véhicules concernée par la LEZ, ce qui lui permet d’informer ses campagnes de communication et ses mesures d’accompagnement, afin de cibler au mieux les personnes touchées par la LEZ et de mieux les accompagner.